Autobiographie
Mon obstination et mon amour pour la République Démocratique du Congo me pousse à être de tous les combats pour la dignité du peuple congolais.
Mes premiers pas en politiques, je les fais à l’Université Nationale du Zaïre, Campus de Lubumbashi, ou je m’enrôle dans la Brigade de la Jeunesse du Mouvement Populaire de la Révolution. Je travaille dans les cellules de base pour organiser la vie estudiantine dans des activités para-académiques. Les autorités politiques de l’époque poursuivaient un but. Celui de canaliser et de contrôler le mouvement contestataire estudiantin. Il faut dire qu’a l’époque, nous n’avions pas de choix. Tout le monde était de facto membre de la JMPR. Je me suis engagé dans le but d’en tirer ce que je pouvais. Apprendre le fonctionnement d’un Parti Politique à la base. Depuis lors je n’ai pas cessé de mettre mon talent, mon intelligence, mon savoir-faire et toutes mes forces au service des causes qui me paraissent justes.
Littéraire, Agrégé de l’enseignement secondaire du degré supérieur,Licencié en Langue et Littérature Anglaises, Docteur en Sciences Politiques et Journalisme, journaliste, communicologue, activiste, agitateur d’idées, créateur d’entreprises, homme politique, je poursuis passionnément un destin que j’ose croire, est intimement lié à celui de la République Démocratique du Congo, mon pays.
Ma vie
1954 – 1961: La tendre enfance.
Je suis né le 22 Septembre 1954 à Sungu Kovo Kovo dans le territoire de Kasongo, Province du Maniema. Baptise selon la tradition catholique, je reçois le nom de Barnabé Samuti Kikaya (qui deviendra Kikaya Bin Karubi avec le recours à l’authenticité). A cette époque, mon Père, Kikaya Ali Useni Mwalimu Jean Karubi allait de localité en localité créer des écoles primaires pour la scolarisation des populations indigènes. Lorsqu’intervient l’indépendance en 1960, notre famille se trouve à Kaparangao Langilwa où mon Père s’était lié d’amitié avec Kapepa Revocath, un des conférenciers de la Table Ronde de Bruxelles sur l’avenir politique du Congo. Très jeune, j’ai vécu l’effervescence des années de l’indépendance. La politisation était maximale avec son corollaire de démocratisation mais aussi de démagogie.
1961 – 1967: Les années sombres.
Les événements se précipitent. Le 17 Janvier 1961, le Premier Ministre Patrice Emery Lumumba est assassiné, déclenchant ainsi une rébellion dirigée par Pierre Mulele et qui s’installe sur une grande partie de l’Est de la R D Congo. Ma famille est obligée de se réfugier à Kisandji d’abord, puis dans la forêt de Kipaka Lutshi de peur des représailles des rebelles contre tous ceux qui étaient perçus comme étant de mèche avec les Occidentaux. Mon Père, de part sa position d’Enseignant catholique et à cause de ses accointances avec Revocath Kapepa, qui venait d’être exécuté, était recherché pour être tué à son tour. Pendant plusieurs mois, nous vivons dans la jungle. Mon frère et moi, apprenons l’art de la chasse, de la cueillette et de la pêche. Nous nous imprégnons des traditions Bindja, ce qui nous a manqué à cause des nombreuses mutations que mon Père devait subir dans sa vie d’instituteur. Officiellement, la rébellion muleliste prend fin en 1965. Nous quittons la forêt pour nous installer à Kipaka Lutshi, notre village. L’accalmie me permet de reprendre le chemin de l’école et de terminer mes études primaires avec deux années de retard.
1967 – 1975: Lautoprise en charge.
Après un bref passage à l’Institut Mala de Kasongo, mon Père m’emmène à Elizabethville ou vient de s’établir mon frère ainé Martin Claude Kikaya, agent informaticien à la Gecomines. Je suis inscrit en 1ère année du Cycle d’Orientation à l’Institut Saint Francois de Sales. Grâce à mon éducation catholique, les pères salésiens m’adoptent et m’offrent le soutien moral que je venais de laisser au Maniema. Pendant trois ans, j’évolue bien dans cette école que fréquentaient les enfants des familles aisées de cette ville cuprifère. Arrivé en 3ème Littéraire, un différend avec le Professeur des Mathématiques me pousse à quitter le Collège Saint Francois de Sales pour me retrouver à l’Athénée de la Katuba, ensuite à l’Institut Kaozi de Moba. Une année après, les pères salésiens me récupèrent mais cette fois ci à l’Institut Ima de la Kafubu. Là, je termine mes études secondaires à l’aube de mes 22 ans.
1975 – 1981: Camarade O!
Tous les Kasapards le savent. Ce campus universitaire est un microcosme de toute la République Démocratique du Congo. Toutes les Provinces, tous les territoires, toutes les tribus s’y retrouvent, faisant de la vie sur le campus, une immersion totale dans la culture congolaise. A ce propos, l’election du Secrétaire Exécutif de la JMPR était un derby digne de ce que nous vivons aujourd’hui pendant la campagne électorale. Moi qui regrettait de n’avoir pas fait le Droit, faute de moyens pour me rendre à Kinshasa où cette matière était enseignée, je me plonge dans l’apprentissage de la langue de Shakespeare à coeur joie. Je m’implique dans des activités politiques estudiantines dans la jeunesse du Mouvement Populaire de la Révolution. Je décroche mon diplôme de Licence avec la mention ” Distinction”, ce qui me donne accès à l’Assistanat à la Faculté des Lettres, métier que j’exerce pendant deux ans jusqu’en 1983.
1983 – 1989: Les années américaines.
Le Centre Culturel Américain de Lubumbashi organise un concours appelé ” Graduate Record Exam”. Je suis parmi les 4 lauréats à travers la République qui réussissent au concours et reçoivent la “Fulbright Scholarship”,bourse qui me permet d’aller poursuivre mes études doctorales à Boston University dans le Massachusetts. Le pays de l’Oncle Sam me permet d’observer mon pays de l’extérieur et de mieux le comprendre. J’accentue mon apprentissage de la pratique politique en devenant membre de l’UDPS, suite à la lettre des 13 parlementaires qui avaient osé défier le régime de Mr Mobutu.
En plus de cela, je suis élu Président des Etudiants Africains de Boston University. J’en profite pour étudier le système politique américain en m’enrôlant comme volontaire dans la campagne de Walter Mondale et Geraldine Ferraro contre Ronald Reagan, ensuite dans celle de Michael Dukakis, ancien gouverneur du Massachusetts. Je m’engage aussi dans le mouvement anti-apartheid pour la libération de Nelson Mandela me liant d’amitié avec les nombreux étudiants sud africains qui étudient à Boston et ses environs.
Lorsque j’obtiens mon PhD en 1989 des mains du President Français François Mitterrand et du Chancelier Allemand Helmut Khôl, invités d’honneur à notre cérémonie de remise des titres académiques, je décide de m’exiler en Afrique du Sud où je travaille comme journaliste, puis Rédacteur en Chef du Service Francais de la Radio Télévision Sud Africaine, Canal Afrique.
1989 – 1995: L’exil
Le choix de l’Afrique du Sud était premièrement celui de poursuivre avec des amis activistes, notre campagne “Divest” qui a obligé les grandes multinationales à se désengager et à ne pas fréquenter le régime raciste de l’époque. Il faut savoir que l’Afrique toute entière connait des turbulences consécutives au démantèlement du bloc communiste. Les événements planétaires tels la chute du mur de Berlin, la libération de Nelson Mandela, le vent de démocratisation qui souffle en Afrique ne laissent pas la RD Congo indifférente. De l’Afrique du Sud, j’accompagne le processus de démocratisation de mon pays par mes interventions, mes analyses, mes programmes et reportages à Canal Afrique. Ce qui contribue à l’affaiblissement du régime dictatorial de Mr Mobutu que je poursuis dans tous les forums internationaux. Cette période me permet d’élargir mes réseaux de contact et d’enrichir mon carnet d’adresse de par le fait que je couvre pour les médias sud africains, tous les grands événements internationaux.
1995 – 1997: Le retour au pays.
Le retour au pays se fait sans problèmes. Le paysage politique de la R D Congo a beaucoup évolué. Ayant constaté que l’UDPS était figée dans une politique réactionnaire primaire qui en définitive faisait le lit du régime de Mr Mobutu, je m’engage au sein de l’UDI, l’Union des Démocrates Indépendants, dirigé par Mr Alexis Thambwe Mwamba. La raison de ce choix est simple. Cette mouvance connue à l’époque comme étant la mouvance Kengo, était dans la mouvance oppositionnelle avec un pragmatisme et un réalisme que j’ai trouvé constructifs à l’opposé de la mouvance tshisekediste qui, sans le savoir, servait le régime. Alexis Thambwe Mwamba me nomme conseiller administratif au Ministère des Travaux Publics, Urbanisme et Habitat. Pendant huit mois, j’observe, j’analyse, je me fais des amis, je me positionne et je m’imprègne des réalités politiques de mon pays.
1997 – 1998: La nouvelle donne.
L’arrivée des nationalistes dirigés par Mzee Laurent Désiré Kabila est un ballon de sauvetage pour le pays tout entier. L’AFDL qui arrive, efface le tableau et redessine le paysage politique. Les amis de la RTNC m’invitent sur le plateau de la télévision pour commenter les implications de la guerre de Brazzaville pour notre pays. C’est là que Mzee Laurent Désiré Kabila me remarque et se souvient de ce journaliste engagé qui animait les émissions politiques de Canal Afrique, qu’il écoutait religieusement selon ses propres dires. Il me fait venir et me demande de me mettre à sa disposition. Quelques mois plus tard, il me propose un poste d’Ambassadeur au Zimbabwe que j’accepte sans hésiter. Lorsque la guerre d’agression est déclenchée par nos voisins de l’Est, Harare devient la capitale ou se décidera l’avenir de la RD Congo. Mon poste d’Ambassadeur me donne l’occasion de me rapprocher de celui que nous appelons affectueusement, le Soldat du Peuple.
1998 – 2001: Diplomatie de guerre.
Ma participation aux discussions et différentes réunions de stratégie militaire pour combattre l’agression dont nous sommes victimes me permet d’affuter mes armes de stratège politique. Je côtoie l’entourage de Mzee et je fais le pont avec tous les décideurs politiques et militaires de la SADC et plus particulièrement ceux du Zimbabwe, de la Namibie, de l’Angola et de l’Afrique du Sud. C’est dans ce cadre que je travaille pour la première fois sous les ordres du Commandant Joseph, actuel Président de la République. C’est lui qui dirige les délégations militaires de haut niveau qui planifient la riposte contre l’agression. Il venait tout droit de l’Académie Militaire de Chine. Ses interventions forcent l’admiration des Généraux Zimbabwéens et Angolais qui me confient que le Commandant Joseph avait un destin national indiscutable. Il m’arrive même de visiter à maintes reprises les fronts militaires et les positions avancées de nos troupes que dirigeaient conjointement le Commandant Joseph et les Chefs d’Etats Majors des armées de la SADC qui étaient sur le terrain de bataille. Cette période est tellement riche en événements que cela me permet de vivre la “réal politique” de cette région de l’Afrique Australe que j’ai connue de l’autre face en tant que journaliste. C’est ainsi que j’allie le militaire, au politique et au diplomatique. Ambassadeur, je m’adresse à mes collègues accrédités au Zimbabwe. Politique, je participe aux différents forums sur les négociations pour une résolution pacifique de la crise. Et, comme je le disais plus haut, je participe à des réunions de planification militaire de part ma position de représentant du Chef de l’Etat, Mzee Laurent Désiré Kabila.
2001 – 2003: Ministre de la République.
L’assassinat ignoble de Mzee Laurent Désire Kabila propulse à la magistrature suprême, Joseph Kabila Kabange. Malgré tout ce qui a été dit au sujet de ce choix, ma conviction reste qu’il était providentiel dans ce sens que de tous ceux qui étaient dans le premier cercle du Président défunt, Joseph Kabila Kabange était le mieux préparé à prendre les rênes du pouvoir. Fils de Président, il était au front militaire en train de diriger les opérations de combat contre l’ennemi. Il a à maintes reprises été encerclé par les forces ennemis et n’eusse été ses qualités de soldat, il aurait été tué au combat. Nos forces armées savaient cela et voyaient en lui, un véritable chef. La nébuleuse dans les jours qui suivirent l’assassinat était la réaction des hommes de troupe à l’annonce de la mort de Mzee. Une seule personne pouvait leur parler et se faire comprendre. Cette personne s’appelle Joseph Kabila Kabange.
Une fois à la tête du pays, Joseph Kabila se met à recruter des hommes et des femmes avec qui diriger le pays. Il fait appel à ma modeste personne pour occuper les fonctions de Ministre de la Communication et de la Presse, Porte Parole du gouvernement.
A ce poste, je parviens à convaincre mes collègues de l’Exécutif que la guerre est aussi médiatique, et que avec une Radio Télévision moribonde, nous partions perdants. C’est ainsi que j’amorce le travail de réhabilitation de la RTNC, la construction de la nouvelle antenne de Binza Pigeon, le passage au numérique, la réhabilitation de tout le réseau du Renatelsat, la revalorisation du métier de journaliste…tout un programme malgré l’état de guerre généralisée dans lequel nous évoluons.
En 2003, le Président de la République atteint l’objectif principal qu’il s’était fixé: la maîtrise du cadre macro-économique, la fin de l’hyperinflation et sur le plan politique, l’organisation du dialogue inter-congolais à Sun City.
2003 – 2006: Présidence de la République.
A l’avènement du gouvernement 1+4, le Président de la République fait de nouveau appel à ma personne pour travailler à ses côtés comme Secrétaire Particulier. Me voici de nouveau dans une position qui me permet d’influer sur le cours des grands événements. Je travaille comme courroie de transmission entre le Chef de l’Etat et ses 4 Vices Présidents. Et cela jusqu’aux élections de 2006 au cours desquelles je suis élu Député National pour la circonscription électorale de Kasongo au Maniema, mon territoire d’origine, avec plus de quarante quatre mille voix.
2007 – 2009: L’Assemblée Nationale
Période très enrichissante, les deux années que je passe à l’Assemblée Nationale m’apprennent tout sur le mécanisme parlementaire et l’adoption des lois. Je suis membre de la Commission des Affaires Étrangères, bien évidemment. Un mot sur le fonctionnement de cette institution, tout se passe bien malgré quelques difficultés d’apprentissage des pratiques parlementaires. Nous étions presque tous des “bleus” pour utiliser le langage universitaire congolais. La seule chose qui a manqué à cette Assemblée, c’est un chef de file de l’opposition, poste qui revient au Sénateur Jean Pierre Bemba Gombo. Ce dernier étant incarcéré à la Cour Pénale Internationale, il aurait dû désigner quelqu’un d’autre à sa place ou du moins demander à tous les Partis d’opposition de s’organiser afin de constituer un véritable contre-pouvoir. Mais hélas, cela ne fût pas le cas et le résultat est que (car la situation n’a pas changé), personne n’est à mesure de faire des propositions alternatives au plan du gouvernement pour permettre à la population de mieux évaluer l’action gouvernementale. On se limite a la critique facile. Mais en politique, opposer sans proposer est une forme de démagogie.
2009 – présent: Ambassadeur au Royaume Uni.
Lorsque le Président décide de renforcer le front diplomatique dans les grandes capitales européennes, il me nomme Ambassadeur au Royaume Uni avec juridiction en Irlande, en Norvège, en Suède et en Finlande. Cela fait deux ans que nous nous attelons à la lourde tâche de redorer l’image de notre pays dans ces pays européens. La tâche est difficile mais pas impossible. J’ai trouvé une Ambassade à la dérive. Diplomates impayés et sans logis, des locaux dans le quartier de King’s Cross, loin du Centre ville où sont domiciliés toutes les missions diplomatiques, une image du pays exécrable due à la diplomatie du 1+4, qui a vu des Ambassadeurs de l’opposition ou plutôt de la rébellion occuper des postes diplomatiques, une communauté congolaise hostile à leur propre pays, ignorante du rôle d’une Ambassade et a la solde d’un leader nostalgique, jusqu’au-boutiste et irresponsable, bref, tout était à refaire. Et dès mon arrivée, je me suis mis à la besogne. Mes lettres de créance présentées auprès de Sa Majesté Elizabeth II d’Angleterre, j’ai entrepris des visites de courtoisie d’abord à l’Ambassadeur du Koweit, doyen du corps diplomatique, aux Ambassadeurs des Cinq pays du Conseil de Sécurité, puis à ceux de notre région, la SADC, suivi par ceux de l’Union Africaine. Je me suis ensuite rendu chez mon collègue belge, à cause de nos relations historiques. Après la communauté diplomatique de la place, j’ai entrepris une campagne de charme à la Chambre basse du Parlement, la “House of Commons” puis la “House of Lords”. J’ai pris langue avec le gouvernement par le biais du Foreign Office et du “DIFD”, le ministère de la coopération. Puis vint le tour du monde des Affaires, la Bourse de Londres, la Chambre de Commerce, la “London Metal Exchange” ou sont négociés tous les minerais de la RDCongo. Ensuite, l’offensive diplomatique m’a conduit dans les milieux académiques, les “think tanks”, les groupes de pression. Je me suis entretenu avec les ONG tels Global Witness, Amnesty International, Oxfam UK, Red Cross UK et tant d’autres. Partout, le même message. La République Démocratique du Congo reprend sa place dans le concert des Nations. Le Président de la République est résolument décidé à démocratiser le pays et à le rendre fréquentable à tout point de vue.
Sur le plan pratique, j’ai convaincu le gouvernement de payer les dettes dues à des tiers, j’ai fermé les locaux de King’s Cross pour trouver un emplacement digne dans le quartier chic de Oxford Circus, j’ai trouvé un logement pour chaque diplomate, j’ai récupéré la résidence du Chef de Mission située dans le quartier huppé de Hampstead, j’ai obtenu du gouvernement l’achat d’un véhicule haut de gamme pour l’Ambassadeur et d’un véhicule utilitaire pour l’Ambassade. Aujourd’hui, sans fausse modestie, l’Ambassade de la République Démocratique du Congo au Royaume Uni fonctionne comme toutes les autres Ambassades de la place londonienne. Beaucoup reste à faire. Avec l’aide de Dieu, nous atteindrons les objectifs que nous nous sommes fixés à notre arrivée en Grande Bretagne.
Barnabé Kikaya Bin Karubi