Burundi : Un pays de plus en plus isolé et menacé
Le régime du président Ndayishimiye est confronté à une crise existentielle multiforme.
“Ici, le quotidien devient déjà invivable”, explique une jeune Congolaise qui préfère garder l’anonymat, qui a traversé la frontière burundaise en début de semaine dernière, quelques heures avant l’offensive des troupes antigouvernementales de l’AFC/M23 contre Uvira, la ville frontalière du Sud-Kivu piquée sur le lac Tanganyika.
Depuis, avec des milliers de Congolais, elle survit à Gatumba, la sœur jumelle d’Uvira, de l’autre côté de la frontière.
Plusieurs témoignages font état d’une promiscuité insupportable dans cette ville où rien n’est prêt pour accueillir ces milliers de Congolais. “Dans certains coins où sont amassés les réfugiés, la tension est terrible. Ces gens manquent de tout, il règne une odeur insupportable. Il n’y a aucune commodité”, explique un autre réfugié qui espère pouvoir retraverser la frontière vers la République démocratique du Congo (RDC) ce dimanche après-midi malgré la fermeture officielle de ce point de passage. “Il y a des endroits où on peut passer. La situation semble calme à Uvira. Là, j’ai un toit, de la famille et je peux travailler. Ici, c’est l’enfer. J’espère que les rebelles qui contrôlent la ville me laisseront passer. Je n’ai aucun document d’identité. Juste la possibilité de demander à des membres de ma famille de venir se porter garantes pour moi ; mais elles ont peur de discuter avec des hommes en armes”, explique-t-il, en se disant “à bout de forces”.
Isolement
Les Burundais, eux, savent qu’ils vont vivre des moments encore plus compliqués. La crise économique qui sévit dans le pays depuis des mois ne cesse de s’aggraver. Les denrées se font rares, les prix s’envolent encore et la fermeture annoncée de la frontière avec la RDC ne va qu’accroître ces difficultés d’autant que la frontière avec le Rwanda est, elle, toujours fermée depuis le mois de janvier 2024.
Pour le Burundi, pays enclavé, seul le point de passage avec la Tanzanie reste ouvert actuellement. Mais le voisin du sud est loin d’être un havre de paix. La présidente tanzanienne, Samia Suluhu Hassa, est arrivée au pouvoir en 2021 après le décès de son prédécesseur John Magufuli. Elle a prêté serment pour un nouveau mandat le 3 novembre dernier après un scrutin qu’elle a remporté avec, officiellement, plus de 97 % des voix. Un résultat par l’opposition. La jeunesse, elle, n’a pas hésité à descendre dans la rue pour faire entendre son mécontentement malgré la répression organisée par le pouvoir. Plus de 700 personnes ont trouvé la mort dans ces manifestations violemment réprimées. Aujourd’hui, la contestation est quelque peu retombée mais la tension reste palpable et les Burundais savent qu’à la moindre étincelle dans cet État, leur pays sera totalement isolé et sans voie d’accès vers le reste du monde.
Tensions internes
“On dépend désormais totalement de ce point de passage pour tout notre commerce”, explique un importateur qui doit réorganiser son “business” avec la fermeture de la frontière congolaise. “La pénurie d’essence va être encore plus importante et le pays sera encore un peu plus à l’arrêt. Jusqu’ici, quelles que soient les interdictions d’importer ou les tensions entre les deux pays, le commerce fonctionnait bien avec le Congo et tout le monde s’arrangeait”, enchaîne une autre commerçante située sur le lac Tanganyika. “Aujourd’hui, c’est un nouveau coup d’arrêt et, surtout, la tension militaire est vraiment perceptible à l’intérieur et à l’extérieur du pays. Si le régime de Ndayishimiye devait être renversé, personne ne le pleurerait au Burundi”, continue-t-elle avant d’ajouter, “mais il faut éviter un nouvel embrasement, personne n’a oublié les morts de la répression de 2015 quand l’ancien président Nkurunziza a fait donner la troupe pour se maintenir au pouvoir”.
Aujourd’hui, la voie politique est au point mort au Burundi. Le CNDD-FDD, du président Ndayishimiye, n’a laissé aucun siège du parlement aux autres formations politiques dont les cadres vivent désormais pratiquement tous en exil.
Le retour au pays des militaires burundais déployés en RDC ajoute une nouvelle couche de frustration à l’intérieur des frontières. La présence de membres de milices et de militaires congolais fait peser un autre danger, celui d’une confrontation directe entre Congolais sur le territoire burundais. Corneille Nangaa, le patron de l’AFC/M23, martèle qu’il ne veut pas de conflit avec le Burundi, mais la présence de troupes congolaises et un régime burundais hostiles à l’AFC/M23 laissent planer un solide doute.
Par https://afrique.lalibre.be/79899/burundi-un-pays-de-plus-en-plus-isole-et-menace/

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