Meeting aérien : Le tweet qui énerve!

Et pourtant, plus de 90 000 personnes l’ont lu, plus de 6 000 ont interagit, plus de 500 ont commenté, plus de 400 l’ont aimé, plus de 150 l’ont retweeté, et ce n’est pas fini. Nous avons rempli le stade des Martyrs. Ces statistiques confirment l’intéret pour ma perception exprimée en des termes simples pour évoquer cette aventure qui me paraissait trop osée et qui ressemblait à ce que ferait quelqu’un qui, à court d’arguments, montre ses muscles à son adversiare pour lui dire: “Nakobeta yo”. (Je vais te taper)
Mais sérieusement, du fait que le gouvernement Sylvestre Ilunga Ilunkamba jouisse pour l’instant de la plénitude de ses prérogatives constitutionnelles, l’article 91 de la Constitution lui reconnaît la compétence de disposer des forces armées. Rien alors ne peut se faire dans le cadre de la coopération militaire structurelle sans son implication !
LES FORCES AÉRIENNES EXISTENT
Le meeting aérien organisé à Kinshasa le 20 novembre2020 a suscité des réactions en tous sens. Les unes en soutien, les autres en interpellation. La mienne a fait l’objet d’une extrapolation non pas que maladroite mais surtout insidieuse.
Pourtant, nous avons posé un problème réel par ces temps qui courent : un meeting aérien, de surcroît militaire et en plus dans le cadre de la coopération structurelle, n’a de sens que lorsqu’il obéi au principe de contribution respective.
Quand, par exemple, on parle de meeting aérien États-Unis/Corée du Sud, Washington aligne ses avions, Séoul en fait autant. Quand on parle du meeting aérien France-Egypte, Paris et Le Caire mettent chacun ses avions de guerre.
Or, dans le cas de celui de Kinshasa présenté pour une première – il l’est dans l’originalité – on n’a vu que des aéronefs angolais. Comme si la RDC n’en avait pas.
Heureusement que le chef d’État Major-général des Fardc a édifié l’opinion : malgré l’embargo dont le pays est l’objet de la part de certaines puissances militaires étrangères, la force aérienne congolaise existe, contrairement à l’information livrée par un quotidien de la place.
Le Lieutenant-Général Célestin Mbala a déclaré au sujet du meeting aérien de Kinshasa que ” Nos avions de chasse et nos hélicoptères sont en parfait état, sauf que nous n’avons pas trop voulu paniquer la population “.
Cette flotte aérienne achetée d’ailleurs du temps où le même Général Mbala était Chef de la Maison Militaire du Président Joseph Kabila, serait basée à la base militaire de Ndolo ou de Ndjili que ce média se serait organisé pour l’ignorer alors que lorsqu’on place depuis 3 ou 4 ans les FARDC parmi les 10 premières armées d’Afrique, c’est autant en effectifs et en formation qu’en équipements. Dire que dans le cadre des élections de 2018, les hélicos des Forces aériennes et les avions transporteurs des troupes avaient été mis à la disposition de la CENI pour acheminer le materiel electoral dans les coins reculés du pays au vu et au sû de tout le monde.
LUANDA, SADC, UA : RIEN QUE DE L’OPPORTUNISME
Qui est cependant le ” patron ” des FARDC ? Voilà une question intéressante.
D’aucuns pensent que c’est le Président de la République du fait d’en être le Commandant Suprême ! Loin s’en faut. La Constitution est formelle : si, aux termes de l’article 91, la défense nationale fait partie des domaines de collaboration entre, le Président de la République et le Gouvernement, le même article dit de cette dernière institution qu’elle dispose des Forces Armées et de la Police Nationale.
Point n’est besoin d’être un esprit averti pour le comprendre : la coopération militaire relève de la compétence du gouvernement. C’est, d’ailleurs, pour cette raison que lors du rétablissement de la coopération militaire à minima avec Washington, le gouvernement a été représenté par le Ministre de la Défense Nationale. La cérémonie a eu lieu après la suspension des réunions du Conseil des Ministres. Et en tant que accord international, elle requiert pour son entrée en vigueur le quitus du Parlement.
Pour l’instant, on se limite à l’Exécutif. Le Président Tshisekedi s’est rendu à Luanda lundi 16 novembre. Le jeudi 20 novembre, il y a eu le meeting aérien.
A-t-on vu des images des ministres congolais et angolais de la Défense signer un accord pour cette initiative ? Il n’y en pas.
Au sujet de la coopération militaire RDC-Angola, il y a de quoi avoir pitié de Kinshasa lorsqu’on donne l’impression qu’elle est en train d’être établie ou rétablie. Cette coopération existe depuis deux décennies : militaires et policiers congolais bénéficient de l’assistance angolaise en la matière depuis Laurent-Désiré Kabila. Joseph Kabila l’a renforcée pendant ses divers mandats.
Si on interroge l’histoire, on saura que l’UDPS – qui se vante de ses 37 ans de lutte pour la démocratie et l’État de droit – a passé plutôt tout ce temps à discréditer, à diaboliser les forces gouvernementales de son propre pays. Jusqu’en 2018, ce parti, en plus n’a jamais été tendre à l’égard de la SADC, la seule organisation sous-régionale au sein de laquelle l’Angola est active, contrairement à la CEEAC et à la CIRGL. Tout comme il ne l’a jamais été à l’égard de l’Union Africaine au profit de l’Union Européenne et des États-Unis. Transformer soudain Luanda, la SADC et l’UA en partenaires privilégiés n’est rien d’autre que de l’opportunisme.
UNE PERCEPTION GEOSTRATEGIQUE
Pour terminer, il faut avoir une lecture géostratégique des relations entre Kinshasa et Luanda.
En dehors des intérêts autour du pétrole (Kongo Central), l’Angola n’a d’intérêts pour la RDC que par rapport au Katanga où sont concentrés des intérêts dans les minerais et dans le transport ferroviaire en utilisant le chemin de fer du Benguela vers le port maritime de Lobito pour l’exportation des minerais congolais.
Quand on a une telle lecture pragmatique des enjeux, on ne peut que percevoir le meeting aérien sous un autre visage.
C’est ma perception. Je l’ai exprimée dans ce tweet qui énerve ceux qui ne voient pas plus loin que le bout de leur nez.

Barnabé Kikaya Bin Karubi
Professeur, Université de KINSHASA, Faculté des Lettres, Département des Sciences de l’Information et de la Communication | Twitter @kikayabinkarubi | www.kikayabinkarubi.net
Merci Professeur de ne cesser d’éclairer l’opinion, CONTINUEZ ✊🏽✊🏽✊🏽
Le tout retombe toujours sur celui qui a signe l “accord” et fabrique une majorite parlementaire , esperant continuer a controler le pays … Le bras de fer est enclenche et c estnle peuple qui va en patir . Chacun doit assumer ses responsabilites dans ce debacle.
Analyse très pertinente. Bravo Professeur pour la lanterne ainsi éclairée. L’obscurantisme que l’on nous inculque ces derniers temps risque de nous dire perdre la raison. Encore une fois MERCI
Très bonne analyse, Mr Kikaya !
Il y a autant d’opportunisme que d’amateurisme dans cette histoire de Meeting aérien. Si les personnes liées par un accord (l’exemple de la coalition FCC-CACH me traverse l’esprit en premier), ces personnes doivent, lors d’un problème ou un prétendu problème, s’asseoir autour d’une table, parler du problème et, au cas où les conditions sont réunies, revoir les clauses de leur accord si c’est l’unique issue au problème.
Je vous plaint, FCC-CACH, pour, d’une part, avoir mal choisi un partenaire (le CACH) et, d’autre part, d’être entré dans une coalition comme dans un mariage de deux personnes totalement différentes : l’une expérimentée et mâture (FCC), l’autre novice et bébé (le capricieux CACH).
Pour ce qui est de “l’intérêt” de l’Angola pour le Katanga, j’ajoute que l’Angola a une énorme dette morale envers le Katanga : ce sont les gendarmes Katangais qui avaient donné la victoire au MPLA contre leurs adversaires lors de la guerre qui l’opposait aux autres partis chapeautés par le Portugal.