RDC : Félix Tshisekedi a-t-il nommé un mort à la tête d’une zone militaire ?

Le président congolais poursuit son vaste remaniement de l’armée, écartant des figures de l’ère Kabila de postes clés. Le général Tshibangu a été nommé dans le Kasaï tandis qu’à l’Est, un successeur à Philémon Yav a été désigné. Mais une polémique est venue éclipser ces décisions stratégiques.
C’est une affaire dont se sont délectés les réseaux sociaux et qui a été, pendant quelques heures, du pain béni pour les pourfendeurs du régime de Félix Tshisekedi. Ce lundi 17 octobre, une présentatrice de la RTNC, la télévision nationale congolaise, a lu une ordonnance présidentielle actant une série de nouvelles nominations militaires, un domaine stratégique.
Elle a annoncé la désignation de Floribert Kisembo Bahemuka comme commandant opérationnel de la zone Nord de l’Équateur. Cela a très vite fait grand bruit, et pour cause : ce général est mort depuis onze ans. Il a été tué le 30 avril 2011 lors de combats en Ituri (Est).À LIRERDC : Félix Tshisekedi chamboule le commandement de l’armée
« C’est une erreur de prononciation », a réagi auprès de Jeune Afrique Erik Nyindu Kibambe, le directeur de la communication de la présidence congolaise. Une erreur très importante et suspecte, tant les deux noms sont différents. Dans un communiqué diffusé ce mercredi, la présidence a tenté de mettre fin à la polémique : c’est le général Kisebwe Lamuseni (et non Kisembo Bahemuka) qui a été nommé, est-il écrit. « Il est bien vivant et on lui souhaite longue vie », conclut Erik Nyindu Kibambe.
Le retour de John Tshibangu
Cette polémique fait mauvais genre alors que Félix Tshisekedi est en train de remanier en profondeur le commandement militaire des Forces armées congolaises (FARDC). Ce lundi, plusieurs autres nominations stratégiques ont été annoncées. Le général John Tshibangu revient à un poste-clé en prenant la tête de la 21e région militaire, qui couvre les régions du Kasaï, d’où est originaire le chef de l’État.
Ce militaire de 52 ans est connu pour s’être opposé frontalement à Joseph Kabila. Lors de l’élection présidentielle de 2011, il avait publiquement pris parti pour Étienne Tshisekedi, principal opposant au président d’alors et père de l’actuel chef de l’État, et revendiqué sa victoire. Un choix qui l’avait poussé à déserter et partir en exil l’année suivante.
En 2018, il avait à nouveau fait parler de lui. Dans une vidéo diffusée sur les réseaux sociaux, il avait posé un ultimatum de 45 jours à Joseph Kabila pour quitter le pouvoir. Sinon, il ne cachait pas être prêt à le chasser par les armes. Onze jours plus tard, il était arrêté à l’aéroport de Dar es-Salaam, en Tanzanie, avant d’être extradé vers la RDC.À LIRETanzanie – RDC : l’ex-colonel John Tshibangu extradé vers Kinshasa, après six ans de traque
Philémon Yav remplacé
Le prédécesseur de John Tshibangu dans le Kasaï, Marcel Mbangu Mashita, est lui nommé commandant de la troisième zone de défense. Ce général expérimenté – c’est notamment lui qui avait été chargé de l’enquête sur la mort suspecte de Delphin Kahimbi, le chef d’état-major adjoint des FARDC en charge du renseignement militaire sous Kabila – prend des fonctions sensibles et stratégiques. Il opèrera dans cinq provinces de l’Est, où sévissent les groupes armées, notamment le M23 qui a relancé son offensive il y a près d’un an et tient toujours la ville de Bunagana. Il succède ainsi à Philémon Yav, qui a été arrêté le 20 septembre dernier.
Les motifs de l’arrestation du « Tigre », tel qu’il est surnommé, ne sont toujours pas officiellement connus, mais cette incarcération intervient alors que Félix Tshisekedi écarte plusieurs figures de l’ère Kabila. Dans la nuit du 3 au 4 octobre, il avait ainsi nommé Christian Tshiwewe Songesha à la tête des FARDC, en remplacement de Célestin Mbala.
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