SADC OU EAC ? Le choix catastrophique de Tshisekedi !
Parrainé par Uhuru Kenyatta Félix Tshisekedi va-t-il sortir la RDC de la Sadc pour l’Eac ? Le doute n’est plus permis. Lors de la dernière réunion de la Communauté économique de l’Afrique de l’Est (Eac en anglais) à Nairobi le 20 juin 2022, la décision la plus importante prise par 6 des 7 chefs d’Etat des pays membres est le déploiement imminent d’une force militaire régionale à l’est de la RDC où les provinces du Nord-Kivu et de l’Ituri sont déjà sous état de siège. En s’abstenant d’y prendre personnellement part, la présidente de la République Unie de Tanzanie, Samia Suluhu, semble avoir lancé un message clair de désaveu à Félix Tshisekedi pour ingratitude avérée.
En effet, la Sadc – dont les militaires continuent d’aider la RDC depuis 1998 – a toujours pris fait et cause pour le peuple congolais dans toutes les tribunes régionales, continentales et internationales.
Première preuve en 1998 avec la participation décisive, aux côtés des Fac (Forces armées congolaises), des armées angolaises, namibiennes et zimbabwéennes dans la neutralisation, au Kongo central et à Kinshasa, des troupes rwandaises opérant sous le couvert du Rcd.
Deuxième preuve en 2012, lors d’une autre agression – toujours rwandaise – sous le couvert du M23. Trois pays membres de la Sadc (Tanzanie, Afrique du Sud et Malawi) avaient mis à la disposition de la Brigade d’intervention intégrée dans la Monusco leurs militaires. D’ailleurs, ils y sont encore.
Troisième preuve en 2022. Ce sont les mêmes militaires qui opèrent dans la Mission onusienne présente aux côtés des Fardc pour contrer la nouvelle agression rwandaise, encore sous le couvert du M23.
Il sied de noter que la Sadc compte 15 pays : Botswana, Comores, RDC, Eswatini (ex-Swaziland), Lesotho, Madagascar, Malawi, Maurice, Mozambique, Namibie, Seychelles, Afrique du Sud, Tanzanie, Zambie et Zimbabwe. L’Eac en compte 7 : Kenya, Ouganda, Tanzanie, Rwanda, Burundi, Soudan du Sud et Tanzanie.
Le seul pays à être membre à la fois de la Sadc et de l’Eac est la Tanzanie qui a réduit sa représentation au dernier sommet de Nairobi à son ambassadeur. Pourtant, elle aurait pu y déléguer soit le Premier ministre Kassim Majaliwa, soit la ministre des Affaires étrangères Liberata Mulamula, très au fait des questions sécuritaires dans les Grands Lacs.
Aussi paradoxal que cela puisse paraître, les pays agresseurs de la RDC à un moment ou à un autre appartiennent tous à l’Eac (Ouganda, Rwanda et Burundi). Ce qu’aucun pays de la Sadc n’a fait.
CHAMP DE GUERRE ET DE VACHE A LAIT
En août prochain, Félix Tshisekedi va accéder pour une année à la présidence de la Sadc à l’occasion du 42ème sommet ordinaire prévu à Kinshasa.
Comment saura-t-il assumer cette responsabilité à la tête d’une organisation qui semble ne plus lui inspirer confiance ?
D’ailleurs, en termes de confiance, le constat général est que même la Cééac – dont il assure la présidence en exercice depuis le 19 janvier 2022 – n’est pas dans son agenda.
Cette communauté comprend 13 pays : Angola, Burundi, Cameroun, Centrafrique, Congo-Brazzaville, République Démocratique du Congo, Gabon, Guinée Equatoriale, Rwanda, Sao Tome & Principe et Tchad. A mi-mandat, on ne lui connaît aucune mission de bons offices dans l’un ou l’autre de ces pays. Cas du Cameroun, de la RCA et du Tchad pourtant en proie à de très sérieux problèmes de sécurité.
En fin de compte, on ne peut pas ne pas se demander dans quel schéma diplomatique Félix Tshisekedi est en train d’entraîner la RDC qu’il isole volontairement à la fois de la Sadc et de la CEEAC au profit de l’EAC, une communauté dont bon nombre d’Etats membres traitent son pays en champ de guerre et en vache à lait.
Sur ces entrefaites, les géostratèges sont, eux, convaincus que l’Afrique de l’Est de demain ne sera puissance sous-régionale qu’en absorbant les provinces congolaises de l’Ituri, du Nord-Kivu et du Sud-Kivu.
LES PARLEMENTAIRES EN VACANCES PENDANT L’AGRESSION
A propos de l’EAC, ce qui doit absolument inquiéter l’opinion congolaise et, en même temps, interpeller l’opinion internationale, c’est cette décision terrible prise le 15 juin 2022 par les bureaux de l’assemblée nationale et du sénat d’envoyer d’office en vacances parlementaires les députés nationaux et sénateurs pendant que le pays est agressé !
L’Exécutif entend décider seul du déploiement de la Force militaire régionale.
La responsabilité du chef de l’Etat est établie du fait que l’initiative de la fameuse loi d’habilitation du gouvernement, pour agir librement pendant la « neutralisation » du parlement a été au préalable entérinée en conseil des ministres.
Il s’agit d’une décision lourde de conséquences, car si les choses venaient à se gâter – toutes les conditions sont réunies quant à ce – ceux des parlementaires de l’Union sacrée à avoir voté pour risquent gros. Surtout ceux de l’Est.
L’ordre institutionnel pouvant en faire les frais, les perspectives ne sont donc nullement rassurantes pour la RDC à 18 mois de l’échéance 2023.
UNE DIPLOMATIE DES NULS
Dès l’entame de son mandat en 2019, Felix Tshisekedi aligne des ratés diplomatiques qui devraient faire réfléchir sa cohorte de diplomates qui s’avèrent être des néophytes en la matière et qui passent leur temps à se caresser dans le sens du poil dans une autosatisfaction puérile. Que ce soit sa déclaration d’amour à Israël devant l’AIPAC ( American-Israël Public Affairs Committee), vitrine du lobby pro-Israélien aux Etats Unis, que ce soit sa prise de position sur la question qui oppose le Maroc au Front Polisario au Sahara Occidental, que ce soit la question du siège de l’Afrique Centrale au Conseil de Sécurité qu’il a voulu arracher au Gabon, que ce soit la nomination du Secrétaire Exécutif de la SADC où il était en compétition avec le Botswana, et cerise sur le gâteau, son mandat à la tête de l’Union Africaine, celui à la tête de la CEEAC qui est encore en cours, ou encore son adhésion à l’EAC où il s’est jeté pieds et poings liés dans la nasse de nos agresseurs, rien mais alors rien ne réussit à Felix Tshisekedi dans le concert des nations.
Le moment venu, on pourra s’enorgueillir du retour au pays de la relique de Patrice Emery Lumumba, notre héros national et du concert de la réconciliation des Anges Adorables de Wenge Musica. Et nous reviendrons au « Panem et Circenses » de la Rome antique, où pour gouverner, il fallait donner au peuple le pain et le divertissement !

Barnabé KIKAYA Bin Karubi
Ancien Ministre, Ancien Ambassadeur, Ancien Député, Professeur à l’Université de KINSHASA, Faculté des Lettres, Département des Sciences de l’Information et de la Communication, Kinshasa, R.D. Congo.
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