RD Congo-Zambie : Unis pour les Batteries Électriques ? Pas si sûr !

Il n’a pas son pareil dans l’art de retourner la veste contre ses alliés : Katumbi, Kamerhe, Fayulu, Ambongo et même Kabila en interne ; Kagame, Lourenço et même Sassou et Ramaphosa en externe. Et ce sera bientôt Hakainde en attendant Museveni puis Kenyatta. Normal : la trahison est dans l’ADN de Felix Tshisekedi.
Le 29 avril 2022, à Lusaka, le Président congolais a fait un discours aux accents lumumbistes, sinon kabilistes, c’est-à-dire panafricanistes et souverainistes qu’on ne lui reconnaît pas jusque-là. C’est comme s’il était sevré du parrainage d’un Occident qui le nourrit depuis trois ans de promesses utopiques.
En effet, à l’occasion de la signature de l’accord d’exploitation et de production des batteries électriques conclu entre la République Démocratique du Congo et la République de Zambie, Félix Tshisekedi a surpris l’assistance en déclarant qu’à deux, la RDC et la Zambie, unis par le Lithium et tout ce qui va avec, deviendront maîtres de leur destin. Ce qui, en soi, est une bonne chose.
Le doute prend cependant corps lorsque, tout en étant pleinement conscient de l’enjeu, Félix Tshisekedi entretient la stigmatisation à l’égard du leadership katangais en même temps qu’il en appelle publiquement à la réconciliation entre communautés katangaises et kasaïenne !
Pourtant, quand on a une lecture géopolitique pragmatique, on sait bien que les communautés katangaises sont plus proches des Zambiens, en raison des attaches culturelles et sociologiques communes, que des communautés kasaïennes.
Plus : les ressources naturelles congolaises du Katanga et celles de la Zambie sont quasiment les mêmes !
En prenant le cas des minerais, la Cooperbelt est une région minière que le Congo a en commun avec la Zambie via le Katanga.
De ce fait, le Président zambien Hakainde Hichilema est, tout compte fait, plus à l’écoute du leadership katangais que du leadership national congolais.
Il s’agit là d’une évidence implacable, sans nécessairement en déduire une tentative d’atteinte à la sûreté de l’Etat ou une intention de susciter le tribalisme et d’en faire l’éloge.
Et encore, avec cette même lecture pragmatique, le lithium en RDC se concentre dans la province du Tanganyika dont sont originaires les Kabila pendant que le cobalt et le cuivre sont abondants au Haut Katanga dont sont ressortissants les Bayeke, pour ne pas faire allusion à Moïse Katumbi.
Pour information, les minerais utiles dans la fabrication des batteries électriques sont le lithium, le fer, le zinc, le nickel, le cuivre et le cobalt. A plus de 80 %, ils se concentre dans le Katanga.
C’est pour dire que tout en combattant le tribalisme, le chef de l’État et ses proches ont le devoir d’épargner le Congo des prises de position qui fâchent. Comme c’est le cas aujourd’hui avec l’indexation des Katangais.
L’histoire renseigne qu’à la découverte de tout nouveau minerai ou toute nouvelle matière précieuse sinon de tout nouveau filon intéressant dans une province donnée, il s’observe des velléités ” indépendantistes” dans le chef des leaders se sentant victimes d’exclusion. C’est ce qui est arrivé avec le coltan au Kivu ainsi que l’or et le pétrole en Ituri par exemple.
Dans le cas du lithium, la trahison évoquée en titre résulte du fait que le projet d’exploitation commune peut échouer si Hakainde Hichilema réalise – si ce n’est fait déjà – que Félix Tshisekedi manie à la perfection l’art du revirement.
Déjà, la manière dont les siens préparent les élections de 2023 ne rassure pas.
A l’instar des investisseurs nationaux et occidentaux, les Zambiens pourraient, à leur tour, adopter une attitude attentiste.

Barnabé KIKAYA Bin Karubi
Ancien Ministre, Ancien Ambassadeur, Ancien Député, Professeur à l’Université de KINSHASA, Faculté des Lettres, Département des Sciences de l’Information et de la Communication, Kinshasa, R.D. Congo.
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